Terrorisme islamiste : quand Riyad tente de se disculper
Directement concernés par la pandémie de la violence islamiste, l'Irak, la Syrie et l'Iran sont paradoxalement absents de cette coalition des pays islamiques.
Peut-on promouvoir l'idéologie islamiste radicale, financer le Front al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda qui combat le régime de Damas et appuyer une coalition de la milice islamiste comme Fajr Libya à Tripoli contre le gouvernement légitime exilé à Tobrouk, et être derrière la création d'une coalition islamique pour combattre "militairement" et "idéologiquement" le terrorisme islamiste ?
Il n'y a que l'Arabie Saoudite, promoteur de l'idéologie wahhabite, qui a osé la création d'une coalition de pays musulmans contre le terrorisme islamiste, qui peut réussir une telle prouesse. Cette coalition, de laquelle l'Algérie est absente, sera composée de 34 pays, a annoncé Riyad dans un communiqué répercuté par son agence officielle SPA. Son commandement sera basé à Riyad pour "soutenir les opérations militaires dans la lutte contre le terrorisme", a ajouté SPA. "La guerre contre le terrorisme" est "notre guerre", celle "des musulmans contre les terroristes qui commettent leurs actes horribles au nom de la religion", a réagi le porte-parole du gouvernement jordanien, Mohamad Momani. Pour le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu, "le fait que les pays musulmans s'élèvent ensemble contre la terreur" est "la meilleure des réponses à ceux qui s'efforcent d'assimiler la terreur à l'islam". Dans sa déclaration à l'AFP, lors de son passage à Paris, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, a affirmé que les pays membres de cette nouvelle coalition échangeront des informations, fourniront du matériel et de la formation et des troupes en cas de besoin. "Les décisions seront prises au cas par cas, et aucune option n'est exclue", a-t-il déclaré. Pour le futur prince héritier et ministre saoudien de la Défense, Mohamed Ben Salmane, la nouvelle coalition témoigne "du souci du monde islamique à combattre le terrorisme et à être un partenaire dans la lutte mondiale contre ce fléau", a repris l'APS. Une déclaration qui cache mal une attitude réactionnaire de l'Arabie Saoudite, constamment citée avec le Qatar comme les parrains de l'islamisme radical, comme cela était le cas durant les années 1990 en Algérie. Pointé du doigt de toutes parts, excepté de puissances occidentales qui entretiennent avec lui d'importantes relations commerciales, le royaume saoudien essaye ainsi de se disculper. Un déroulé des faits et des positions politiques de Riyad démontre pourtant le contraire de cette "volonté" de l'Arabie Saoudite à combattre le terrorisme dont la matrice idéologique est l'islam rigoureux pratiqué par la monarchie dirigée par le roi Salmane. S'il n'y avait pas les attentats de Paris le 13 novembre et la persistance de la menace terroriste brandie par l'organisation autoproclamée État islamique (Daech), laquelle a revendiqué plusieurs attaques à l'intérieur du territoire saoudien, Riyad n'aurait peut-être pas songé à prendre l'initiative de former cette coalition. Car avant Daech, c'est plus d'une décennie de lutte contre Al-Qaïda, fondée par le terroriste saoudien Oussama Ben Laden, durant laquelle Riyad et ses nouveaux alliés n'ont pas apporté leur touche. Au Yémen, où les avions saoudiens ont tué des dizaines de civils pour empêcher les chiites houthis de prendre le pouvoir, l'Arabie Saoudite ne s'est jamais inquiétée par l'expansion de la branche locale d'Al-Qaïda en péninsule Arabique (Aqpa), qui a revendiqué l'attentat des frères Kouachi contre le journal satirique français Charlie Hebdo. Au-delà de ces faits, parmi d'autres, le contexte d'une telle annonce pousse à se poser des questions sur la création d'une telle coalition. Car elle intervient parallèlement aux déclarations insistantes des États-Unis à engager des troupes au sol en territoire syrien pour combattre Daech. N'ayant aucune intention, du moins pour le moment, d'engager leurs propres troupes au sol en Syrie et en Irak, les capitales occidentales qui soutiennent l'opposition syrienne contre Bachar al-Assad auraient-elles l'idée de sous-traiter une intervention étrangère dans ce pays en mobilisant la coalition islamique ? Tout laisse supposer cela, à se fier à l'hésitation de la Russie à se prononcer sur l'opportunité d'une telle coalition. "Il nous faut du temps pour analyser puis prendre une décision basée sur les informations précises dont nous avons besoin", a dit le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.
Jtk
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