samedi 28 octobre 2017

De l’islam, des musulmans et de la laïcité ENTRETIEN AVEC JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT

  > 26 OCTOBRE 2017



Président de la Fondation de l’islam de France, Jean-Pierre Chevènement s’explique sur son rôle, sur la place des musulmans et la laïcité, sur les défis posés par les idéologies radicales. Il évoque aussi son expérience en Algérie, la Palestine, la guerre contre l’Irak de 1991 et l’avenir du Moyen-Orient.Nada Yafi. 
En arabe : http://orientxxi.info/magazine/article2059

 Près d’un an après sa création, la Fondation de l’Islam de France (FIF) est parfois confondue avec le Conseil français du culte musulman (CFCM). Quelle est la différence entre ces deux institutions ?
Jean-Pierre Chevènement. — Elle est essentielle. S’agissant du CFCM, instance représentative du culte comme son nom l’indique, il a été créé en 2003 sous la forme d’une association loi 1901, à la suite de la consultation qu’en tant que ministre de l’intérieur j’avais lancée en 1999. Mais elle s’est faite selon des modalités que je n’avais pas envisagées, c’est-à-dire qu’il a fallu que Nicolas Sarkozy y mette la main, les élections du CFCM en 2003 ne pouvant, compte tenu des rivalités internes, départager un candidat qui fût reconnu par tous. Pour trancher le nœud gordien, Nicolas Sarkozy a d’une certaine manière imposé Dalil Boubakeur, le recteur de la grande mosquée de Paris, comme premier président du CFCM. Les élections suivantes ont donné la majorité à un Marocain, Mohammed Moussaoui, ce qui a entraîné peu après un retrait de la Grande Mosquée (GMP), mais aussi de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF). Et par conséquent, cette représentation du culte musulman n’a jamais vraiment trouvé son équilibre.
Les dernières élections ont eu lieu en 2012. Elles ont en fait débouché sur une sorte de présidence tournante entre les membres des trois fédérations qui représentent les pays d’origine, c’est-à-dire l’Algérie avec la GMP, le Maroc avec deux courants, le Rassemblement des musulmans de France (RMF) dirigé par Anouar Kbibech, et une autre sensibilité, l’Union des Mosquées de France (UMF) dirigée par Mohammed Moussaoui—, ainsi que le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) qui relève directement de la Diyanet, du ministère des affaires religieuses d’Ankara. Nous avons donc eu comme président de nouveau Dalil Boubakeur de 2012 à 2015, puis Anouar Kbibech de 2015 à 2017, et aujourd’hui Ahmet Ogras. Voilà pour la représentation du culte musulman, qui a le mérite d’exister, dont je ne vais pas dresser un bilan parce que ce n’est pas à moi de le faire.
Quant à la Fondation de l’Islam de France, c’est l’un des piliers d’une construction voulue par Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur1 de 2014 à 2016, pour relancer l’islam de France, conformément au principe de laïcité qui distingue entre le culturel et le cultuel, et c’est à ce titre qu’il s’est tourné vers moi pour assurer la présidence de la Fondation, laquelle est laïque et n’a donc pas de vocation religieuse.
La fondation est une partie seulement du projet, car l’autre pilier, sans doute le plus important, est l’association cultuelle de la loi 1905, qui bénéficie de privilèges en matière de déductibilité fiscale. Une telle association drainerait les financements et aurait, avec l’accord des autorités musulmanes qui sont nos interlocutrices et l’appui de l’État, le monopole de l’abattage rituel — et je le précise toujours — en désintéressant les trois mosquées qui actuellement se sont vues confier cette capacité (la Grande Mosquée de Paris, celles de Lyon et d’Évry). C’est le deuxième pilier, qui n’a pas aujourd’hui pris consistance, mais le moment en viendra certainement, sous des formes à débattre entre les autorités musulmanes et l’État, au titre de ses responsabilités en matière de sécurité, de cohésion sociale et de santé publique.
La fondation a été créée le 8 décembre 2016. J’y ai été élu président par le conseil d’administration dont je suis le seul membre non musulman parmi les cinq personnalités qualifiées. Il y a aussi un conseil d’orientation quasi paritaire, composé d’une trentaine de personnes, personnalités éminentes, chercheurs, professeurs, juristes, mais également femmes et hommes de terrain. Voilà donc le dispositif. Notre but, je le répète, est profane. Nous sommes une fondation reconnue d’intérêt public. Notre vocation est culturelle, pédagogique, sociale ; elle n’est pas religieuse.
N. Y. — Il est important de le préciser. Certains ont pu penser que la fondation avait pour but d’intervenir dans la formation théologique des imams et la réinterprétation du Coran…
J.-P. C. — En aucune manière. La FIF contribue à assurer la formation profane des imams à travers des diplômes universitaires, où sont approfondis les principes de la République et expliquée la laïcité qui n’est en aucune manière tournée contre la religion. La fondation finance des bourses ; elle vise aussi à relever le niveau de l’islamologie en France. Jacques Berque, hélas mort en 1995, a été mon maître et mon ami. C’était vraiment une lumière, c’est lui qui m’a inspiré cette idée d’un islam de France qui donnerait confiance aux musulmans vivant en France et qui sont Français pour la plupart ; un islam qui se développerait dans le contexte français et serait par conséquent détaché du contexte des pays d’origine. Bien entendu, ces pays sont amis et alliés, et il faut faire en sorte que s’agissant de la formation et de la rémunération des imams, l’évolution de nos relations soient négociée dans un climat de respect mutuel.
Aujourd’hui l’édifice qu’avait conçu Bernard Cazeneuve reste déséquilibré car l’association cultuelle, le deuxième pilier, ne peut être que l’affaire des musulmans d’abord.
À la tête de la FIF, à l’âge certain auquel je suis parvenu, il est sûr que je ne m’y éterniserai pas. Mon but est de la mettre sur orbite. J’aurai un successeur, mais la fondation demeurera laïque, elle ne sera pas communautaire. Elle visera toujours à faire prévaloir l’amitié civique par la connaissance mutuelle entre Français musulmans et non musulmans.
N. Y. — Peut-on alors dire que cette fondation s’adresse à tous les Français ? Qu’elle pourra notamment souligner l’apport de la civilisation arabo-musulmane à l’Occident afin de renforcer l’appartenance de tous les Français au récit national ?
J.-P. C. — Tout à fait. La FIF a pour but de montrer comment la civilisation européenne — et particulièrement française — s’est faite au contact étroit du monde musulman. Cela a pu être un processus conflictuel, mais il a aussi nourri de très nombreux échanges dont l’ampleur est largement sous-estimée, aussi bien sur le plan de la langue, des mœurs que sur le plan scientifique, artistique, philosophique et de la connaissance. Nos histoires sont profondément intriquées. Je fais totalement mienne cette pensée de Jacques Berque : « Je ne veux pas voir l’Arabe avec le regard misérabiliste qui était celui de la colonisation, je veux le voir comme il se voit lui-même, c’est-à-dire un ancien seigneur, un conquérant peut-être aujourd’hui déchu, mais qui garde la mémoire de ses brillantes civilisations. » Je pense d’ailleurs qu’il faut restaurer chez tous l’estime de soi, chez les Français musulmans comme chez les Français en général, qui ont parfois le sentiment que notre pays est en train de sortir de l’histoire. Il faut redonner à tous une certaine fierté d’eux-mêmes basée sur la connaissance et la juste réévaluation de notre histoire et des merveilles civilisationnelles qui nous ont façonnés et sont une richesse pour tous.
N. Y. — Ne pensez-vous pas que le non-dit de la guerre d’Algérie dans l’inconscient collectif des Français complique les rapports à l’islam ?
J.-P. C. — C’est possible, parce que l’histoire est nourrie par les humiliations et les souffrances qui ont pu être subies de part et d’autre… De la guerre de conquête jusqu’à la guerre d’indépendance, les Algériens ont connu une histoire particulièrement violente, qui n’a pas d’équivalent dans l’ancien empire colonial français. Au Maroc, le maréchal Lyautey avait respecté la monarchie chérifienne et la société marocaine. En Tunisie, le beylicat a été préservé. En Algérie, on a prétendu vouloir faire des Français, et c’était une entreprise hasardeuse. Le peuple algérien est une réalité, je dirais même une réalité que nous avons contribué à façonner. D’une certaine manière, l’Algérie d’aujourd’hui, pays immense, très divers, est le résultat de la colonisation française. Avant, il y avait un dey à Alger, un bey à Oran, un bey à Mascara, et les territoires du sud étaient relativement autonomes. Le Hoggar était en réalité très loin d’Alger. C’est dans la lutte pour l’indépendance que le peuple algérien s’est affirmé. Mais les « pieds noirs » qui étaient là depuis un siècle ont eux aussi souffert. Ils ont eu le sentiment de perdre leur patrie. Nous avons raté l’occasion de faire, comme eût dit Jacques Berque, une « nouvelle Andalousie ». Je tiens de l’évêque d’Oran cette parole à la fois profonde et juste : « L’amitié entre la France et l’Algérie est une amitié blessée. Mais les blessures que nous nous infligeons les uns aux autres ne sont pas des blessures ordinaires. Ce sont des blessures comme seuls savent s’en infliger des amis… »
N. Y. — Pourriez-vous évoquer vos propres souvenirs de la guerre d’Algérie ?
J.-P. C. — J’ai été appelé à l’âge de 22 ans car j’ai été reçu à l’École nationale d’administration (ENA) sans préparation. J’ai donc fait un service militaire un peu plus long que la plupart de mes camarades de promotion, de janvier 1961 à décembre 1962. À l’issue de l’école militaire, j’ai choisi les affaires algériennes, c’est-à-dire les SAS2, lointains héritiers des « bureaux arabes » d’autrefois, avec le désir de me rapprocher des populations musulmanes. Les SAS ont été dissoutes à la fin du mois de mars 1962, après les accords d’Évian qui ont marqué la fin de la guerre d’Algérie. J’ai demandé à être détaché auprès du préfet d’Oran, chargé des relations militaires avec l’armée française, mais aussi avec l’Armée de libération nationale (ALN). J’étais convaincu de la nécessité de l’indépendance de l’Algérie et j’approuvais la politique du général de Gaulle. Ce n’était pas le cas de tous les officiers français. C’était la période de l’OAS3. Mais dans l’ensemble, l’armée est restée fidèle. À ce titre, je suis le premier Français (avec le consul général qui venait de Yokohama) à avoir rencontré Ahmed Ben Bella et Houari Boumediène à Tlemcen, le 10 juillet 1962. Je suis resté en Algérie jusqu’à la fin de 1962.
J’y suis retourné ensuite comme stagiaire de l’ENA en 1963. Cette période a été pour moi à bien des égards fondatrice. J’avais beaucoup de sympathie pour le peuple algérien et pour sa lutte, que je jugeais juste. Simplement je pensais comme de Gaulle, et après de Gaulle bien sûr, qu’il valait mieux que l’Algérie devienne indépendante avec la France que contre elle. Donc j’ai été présent dans la dernière période de l’Algérie française, face à l’OAS, pour aider l’Algérie à devenir indépendante.
N. Y. — Le rapport Bertelsman Stiftung paru fin août fait état de réels progrès dans l’intégration des musulmans en Europe, mais souligne la persistance de discriminations, notamment à l’emploi en France. Qu’en pensez-vous ?
J.-P. C. — Je pense que les modes d’intégration sont différents en Allemagne et en France : en Allemagne cette intégration se fait par l’emploi, par l’apprentissage. Avec moins de chômage qu’en France, mais un système scolaire qui oriente dès 11 ans les jeunes vers les Realschulen, puis les écoles professionnelles et la formation par alternance. Le système est une réussite du point de vue de l’emploi. Je ne suis pas sûr qu’il soit accepté en France, où l’orientation se fait plus tardivement (15 ans), et où l’école a une ambition : celle de former le citoyen. L’école est en France le meilleur outil de l’intégration. Avec des résultats tout à fait estimables. On ne parle que des échecs scolaires mais il y a aussi des réussites, notamment parmi les jeunes issus de l’immigration. J’approuve le dédoublement des classes dans les zones d’éducation prioritaires, décidé par le ministre de l’éducation nationale Jean-Michel Blanquer, et qui va dans le bon sens : la réduction des inégalités de départ. Se pose naturellement le problème de l’embauche, qui touche aussi à notre politique économique. Une certaine reprise se manifeste et j’espère que la politique initiée par le président Emmanuel Macron portera ses fruits au plan de l’emploi. Mais il faut y adjoindre une politique volontariste de recrutement « à l’image de la population » comme je l’avais initiée en 1999, avec la création des commissions départementales d’accès à la citoyenneté (Codac).
N. Y. — Êtes-vous pour l’enseignement de l’histoire des religions à l’école ?
J.-P. C. — C’est une suggestion d’un de mes amis proches, Régis Debray, qui a d’ailleurs été introduite dans les programmes dans les années 2000, mais je dois constater que les professeurs ne sont pas bien formés pour enseigner cette matière. L’importance du fait religieux semble leur échapper, indépendamment même de l’histoire des religions. On a le droit de croire ou de ne pas croire, mais il faut que l’école puisse faire comprendre le fait religieux aux élèves, son importance, et en même temps montrer les liens entre les trois grandes religions pratiquées dans notre pays (même si le bouddhisme y connaît aujourd’hui un certain envol) : trois monothéismes nés dans le même petit canton de l’univers, la Palestine, l’Égypte, le Hedjaz. Naturellement le legs de l’hellénisme est extrêmement important. Il est tout à fait curieux de voir que c’est en Méditerranée orientale, finalement, que se trouve la source de nos grandes religions.
La bonne connaissance mutuelle est importante, de même qu’une bonne compréhension de la laïcité, qu’il faut enseigner dans sa dimension émancipatrice sur laquelle on fait trop souvent silence. La laïcité n’est pas que la « tolérance ». Mirabeau disait déjà sous la Révolution : « L’Autorité qui tolère pourrait ne pas tolérer », ce n’est donc pas le bon terme. Ce n’est pas par hasard si le mot « laïcité » n’est mentionné que dans les lois scolaires et pas dans la loi de 1905, car l’École a pour but de former le citoyen, c’est-à-dire un homme ou une femme capable de penser par lui/elle-même et de participer ainsi à la définition du Bien commun. Cette notion de laïcité est mal comprise. Il faut lever la confusion qui existe souvent dans l’esprit des peuples musulmans entre la laïcité et l’athéisme. Cela n’a rien à voir.
N. Y. — La laïcité est parfois mal comprise en France aussi...
J.-P. C. — Il faut la faire comprendre à tous les Français. La Fondation s’attache à lancer un site internet qui va devenir un campus numérique. Nous voulons montrer, outre la diversité des cultures et des civilisations de l’islam, que la laïcité n’est nullement tournée contre les religions. Elle signifie simplement qu’il y a un espace commun à tous les citoyens, où en dehors des dogmes qui leur sont propres, ils doivent s’entendre sur l’intérêt général, de préférence à partir d’une argumentation raisonnée, de la raison naturelle commune à tous. Il y a aussi beaucoup à faire pour relever l’édifice de l’École. Et je dois dire que j’ai confiance en Jean-Michel Blanquer, un homme remarquablement compétent et qui a de bonnes idées.
N. Y. — Pensez-vous que l’intégrisme religieux suffise à expliquer le terrorisme djihadiste ?
J.-P. C. — Non. Mais il faut tout d’abord rappeler que le terrorisme djihadiste sous la forme du takfirisme frappe d’abord les musulmans : Algériens, Irakiens, Afghans, Syriens, ce sont eux qui ont payé le plus lourd tribut. Bien entendu, en Europe il y a d’autres facteurs qui interviennent, en particulier les discriminations que vous évoquiez tout à l’heure, et aussi le sentiment victimaire, quelquefois exagéré, qui nourrit les frustrations pouvant conduire au passage à l’acte terroriste. D’où la nécessité de lutter pour une meilleure justice sociale chez nous. Mais il faut bien le reconnaître, le fondamentalisme religieux existe depuis très longtemps : vous connaissez la tradition hanbalite qui remonte au IXe siècle, le wahhabisme qui existe depuis le XVIIIe siècle. Les Frères musulmans ont été créés au lendemain de la chute du califat ottoman en 1928. Ces courants littéralistes ont prospéré à bas bruit d’abord dans le monde musulman. C’est l’invasion de l’Afghanistan par les Soviétiques qui a suscité le djihad afghan, aidé et armé par les États-Unis, mais ce n’était pas seulement un djihad légitime contre un agresseur extérieur ; c’était aussi une radicalisation obscurantiste par rapport aux problèmes internes de l’Afghanistan, qui opposaient des factions modernistes à des factions obscurantistes.
Donc je veux porter un jugement très nuancé sur cette période qui a quand même été à l’origine d’Al-Qaida, du djihadisme planétaire proclamé par Oussama Ben Laden après la première guerre du Golfe, dont Samuel Huntington a dit qu’elle était la première guerre « civilisationnelle ». C’est ce que j’ai ressenti moi-même à l’époque, et j’en ai tiré les conséquences. Il n’y avait pas beaucoup de responsables politiques sur cette ligne en 1991. Ensuite nous avons eu Al-Qaida, puis l’organisation de l’État islamique (OEI) à la suite de l’invasion de l’Irak en 2003 et de la destruction de l’État irakien par les Américains. L’insurrection des provinces occidentales de l’Irak au bénéfice d’Al-Qaida, puis de l’OEI aura été le prix du traitement qui leur a été administré non seulement par les Américains, mais aussi par le nouveau gouvernement chiite de Bagdad, avec des comportements ultra-sectaires, des exécutions de masse… il faudrait que nos concitoyens comprennent mieux ce qui se passe au Moyen-Orient.
N. Y. — Les interventions étrangères sont donc un facteur de déstabilisation de nature à favoriser l’émergence du terrorisme ?
J.-P. C. — C’est certain. On aurait pu éviter la première guerre du Golfe. C’était parfaitement possible. En octobre 1990, Saddam Hussein était prêt à évacuer le Koweït s’il y avait eu des troupes arabes pour se substituer aux troupes irakiennes, mais la volonté des Américains dès le premier jour (le 3 août 1990) était d’aller à une guerre frontale avec l’Irak, pour ne plus avoir à dépendre d’un « gendarme » régional — autrefois le pacte de Bagdad, la monarchie irakienne hachémite4, ensuite le chah d’Iran, puis Saddam Hussein qu’ils ne jugeaient pas fiable. Ils voulaient avoir des forces installées à demeure, notamment en Arabie saoudite. Ce n’était assurément pas un choix très heureux, et cela a largement entraîné la création d’Al-Qaida par Oussama Ben Laden. Les Américains ont installé leur état-major à Doha. L’intervention américaine a joué un rôle certain dans le développement du terrorisme soi-disant djihadiste. Mais il y a aussi un facteur endogène à ne pas sous-estimer. On ne peut pas faire porter le chapeau seulement aux Américains ou aux Occidentaux. Le « takfirisme » a des racines plus anciennes qui ont été réactivées.
N. Y. — Lors d’une de vos interviews vous avez évoqué une« stratégie d’hégémonie » basée sur « l’organisation du chaos ». Vous avez notamment mentionné « l’exemple de 1967 »…
J.-P. C. — La guerre de 1967 a privé les Palestiniens de leur droit à l’autodétermination c’est-à-dire à un État, s’ils le décidaient. J’ai été le premier socialiste à inclure dans le programme du Parti socialiste en 1972 l’idée que les Palestiniens avaient le droit à l’autodétermination, et par conséquent à un État. Et cela avait d’ailleurs été depuis 1967 la position constante de la France. On accable toujours la France, mais c’est le seul pays qui depuis 1967 maintient une ligne juste. Chacun se souvient de la position très forte qu’avait prise le général de Gaulle en 1967, qui avait valu à la France beaucoup d’inimitiés. Cette politique a été maintenue par ses successeurs, avec la Déclaration de Venise sous Valéry Giscard d’Estaing, le discours de François Mitterrand au Parlement israélien en 1982, l’exfiltration par la France de Yasser Arafat à Tripoli. On se souvient aussi de la réception de Yasser Arafat à Paris par François Mitterrand et des très violentes critiques qu’elle lui a values et qui ont assombri son deuxième septennat. Je pense que cette politique reste affirmée… un peu trop faiblement à mes yeux, parce qu’on ne peut façonner un avenir pacifique sur le « deux poids deux mesures ».
La gestion par le chaos s’est développée avec la guerre d’Irak. Le Moyen-Orient est une région très compliquée ; il y a des États qui ont été créés dans les années qui ont suivi la première guerre mondiale et qui ont acquis une certaine réalité, elle-même ancrée dans l’héritage des anciennes capitales omeyyade et abbasside : la Syrie et l’Irak. Ce que j’appelle la « gestion par le chaos » est la volonté de détruire ces États, de les fragmenter en petites entités si possible religieuses ou ethniques. Par exemple, aujourd’hui il y a des gens qui se prononcent pour l’indépendance du Kurdistan irakien. Ils ne se rendent pas compte que le problème kurde pourrait empoisonner la région pendant encore trente ans de guerres car des pays comme la Turquie ne se laisseront pas démanteler et la Syrie y résistera, légitimement. L’Iran n’est pas prêt à voir se créer un Kurdistan iranien.
Par conséquent, l’intérêt de la paix mondiale est qu’on préserve l’équilibre sur lequel a été fondé l’Irak. Car dans ce pays, il y a une courte majorité chiite et deux minorités sunnites importantes, arabe et kurde. Il faut préserver un équilibre d’ensemble. Je ne suis pas contre l’autonomie interne du Kurdistan, je suis pour, dans le cadre d’un certain fédéralisme qui permette la redistribution des richesses pétrolières entre les trois parties constitutives de l’Irak. Il en est de même pour la Syrie. Les Français le savent mieux que quiconque, puisqu’ils ont exercé un mandat sur ce pays. Séparer la Syrie en plusieurs entités, kurde, alaouite, druze… ? On ne sait pas où on mettrait les chrétiens, peut-être autour de Damas, ils sont quand même près de 10 %, et puis il y a les sunnites, qui sont la majorité, personne ne le conteste, qui pourraient rejoindre les sunnites irakiens. C’était le projet de l’OEI. Il y a de soi-disant orientalistes qui n’arrivent pas à la cheville de leurs grands anciens et qui aujourd’hui, au nom de la critique des accords Sykes-Picot, voudraient casser ces États qui ont des racines historiques anciennes. Voilà ce que j’appelle la « stratégie de l’hégémonie par le chaos ». La France devrait défendre le principe de citoyenneté qui permet de transcender les diversités ethniques et religieuses.
N. Y. — Quel message adressez-vous aujourd’hui aux jeunes Français de confession musulmane ?
J.-P. C. — Un message simple : ils ont le droit de pratiquer leur culte. Ils ont parfaitement le droit d’être musulmans, le droit de croire, mais aussi de ne pas croire. La République française met la liberté de conscience au premier rang de ses valeurs. Ces jeunes sont citoyens français. Leur avenir est en France. Il faut que tous les hommes et les femmes de bonne volonté se mettent ensemble pour forger la France de demain dont ils peuvent être l’élite brillante s’ils le veulent, et si on les guide. Il faut mettre notre pays en phase avec les données du XXIe siècle, en accord et en étroite alliance avec les pays qui nous sont proches, et avec lesquels nous avons une histoire commune : pays d’Afrique du Nord, du Levant, pays d’Afrique, avec lesquels nous devons tisser de nouveaux rapports sur la base de l’égalité, du respect mutuel et d’un projet de civilisation partagée.
1Le ministre de l’intérieur est également ministre des cultes.
2Sections administratives spécialisées, représentant l’autorité civile auprès des communes.
3Organisation de l’armée secrète, créée le 11 février 1961 en opposition à la politique du général de Gaulle, pour défendre la présence de la France en Algérie par tous les moyens, y compris le terrorisme à grande échelle
4De 1933 à 1958.








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mercredi 25 octobre 2017

Un livre : « Le combat vous a été prescrit »,

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Mis à jour le 25/10/2017 à 9h06
Un livre publié ce mercredi 25 octobre, « Le combat vous a été prescrit », retrace l’histoire du djihad en France depuis trente ans. À travers les idées et les hommes, l’ouvrage très documenté de Romain Caillet et Pierre Puchot montre que le phénomène est à la fois ancien, ancré, et qu’il ne s’éteindra pas avec la chute de Daech en Syri
https://www.la-croix.com/France/Securite/Les-racines-du-djihad-en-France-2017-10-24-1200886799

dimanche 22 octobre 2017

LA PERSÉCUTION DES CHRÉTIENS AUJOURD’HUI DANS LE MONDE. Une éradication sournoise et violente. samedi 21 octobre 2017

210 millions de femmes, d’hommes et d’enfants, dans 50 pays, sont persécutés en raison de leur foi.
Imaginez si, sur les 508 millions d’habitants d’Europe, les Français, les Italiens, les Allemands et les Belges seraient chaque jour en bute aux pires maltraitances : bastonnade, lapidation, tortures en tous genres, viols, emprisonnement, discrimination, assassinat. Sur simple dénonciation, pouvant à tout moment être accusés de blasphème. Et cela, dans le silence assourdissant des États, et des Commissions des droits de l’homme de l’ONU, et de l’Union européenne.
Le film entend montrer ce que recouvre le terme générique de "persécutions" avec l’aide de témoins ; comprendre pourquoi au XXI° siècle on tue des chrétiens ; mettre à jour la faillite des États, la disparition de la liberté religieuse et de conscience, promise en 1948 avec la Déclaration universelle des Droits de l’Homme. Il tente aussi d’y voir plus clair avec la charia négatrice de la liberté religieuse, pourtant acceptée comme référence au sein des organisations internationales.
Prenez 90 minutes de votre temps, et venez découvrir l’ethnocide qui se déroule à un jet de pierre de notre conscience. Car, si rien n’est fait pour arrêter le flot destructeur, plus tard, que restera-t-il des chrétiens en dehors des lieux sanctuarisés ? Si un tel malheur arrivait vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas.

https://www.france-catholique.fr/LA-PERSECUTION-DES-CHRETIENS-AUJOURD-HUI-DANS-LE-MONDE-Une-eradication.html?utm_campaign=Emailing+du+sam.+21%2f10%2f2017+%C3%A0+19%3a27%3a44&utm_content=La+pers%C3%A9cution+des+chr%C3%A9tiens...+Bient%C3%B4t+Le+Film+!&utm_medium=Emailing+via+Message+Business&utm_source=Message+Business&utm_term=Soci%C3%A9t%C3%A9+de+Presse+France+Catholique

vendredi 20 octobre 2017

IRAQ - Accès à l’Université de Mossoul possible seulement aux femmes voilées malgré le départ des djihadistes

IRAQ - Accès à l’Université de Mossoul possible seulement aux femmes voilées malgré le départ des djihadistes
 
Mossoul (Agence Fides) – La ville de Mossoul dans le nord de l’Irak n’est certes plus sous le contrôle des milices djihadistes du prétendu « Etat islamique » et ce depuis juillet dernier. Cependant, à l’Université, les étudiants continuent à devoir se plier, au moins partiellement, aux us et coutumes d’origine islamique, y compris en ce qui concerne leur habillement. Une grande affiche placée à l’entrée de l’Université rappelle aux étudiants le type d’habillement et de coiffure qu’ils doivent porter pour accéder aux édifices universitaires et y suivre les cours. Le code d’habillement obligatoire prescrit l’usage du voile pour l’ensemble des étudiantes, qu’elles soient ou non musulmanes.
L’Université a repris ses activités et les étudiants ont recommencé à fréquenter les cours même si de vastes parties des édifices universitaires ont été détruites par les bombardements et n’ont pas encore été remises en service. Outre aux problèmes logistiques, des étudiants chrétiens – indique l’agence d’information Ankawa.com – expriment leur préoccupation quant aux attitudes rigides et intolérantes de certains de leurs collègues musulmans.
A l’Université de Mossoul, la pression exercée par le radicalisme islamiste avait contraint de nombreuses étudiantes chrétiennes à porter le voile dès les années 2004-2005, bien avant que la ville ne tombe sous le joug du prétendu « Etat islamique ». Maintenant, une fois passée la tragique parenthèse du régime djihadiste, reviennent en vigueur les codes de comportement et dispositions qui semblaient dans tous les cas liés à un projet d’islamisation de la vie sociale, ce qui fait que se multiplient les signaux d’une croissante déception des communautés chrétiennes locales quant aux effets des campagnes militaires conduites pour vaincre le prétendu « Etat islamique ». (GV) (Agence Fides 20/10/2017)

jeudi 12 octobre 2017

L’Islam - pour tous ceux qui veulent en parler ,mais ne le connaissent pas encore


Titulaire d’un doctorat d’Etat en sciences politiques, Annie Laurent s’est spécialisée dans les domaines touchant aux questions politiques du Proche-Orient, à l’Islam, aux chrétiens d’Orient et aux relations interreligieuses. Auteur de plusieurs livres sur ces sujets, elle fut aussi nommée experte par le pape Benoît XVI au Synode spécial des Évêques pour le Moyen-Orient qui s’est tenu à Rome en octobre 2010.


Elle a bien voulu accorder un entretien fleuve au Rouge & le Noir à l’occasion de la sortie de son dernier ouvrage, L’Islam - pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore) publié aux éditions Artège en avril 2017. 288 pages.
Quelles sont les principales questions que soulève la présence de l’islam en Europe ?
Annie Laurent : « Naguère, nous rencontrions des musulmans, aujourd’hui nous rencontrons l’islam ». Cette phrase prononcée par le cardinal Bernard Panafieu, archevêque émérite de Marseille, dans une conférence qu’il donnait il y a une quinzaine d’années, illustre bien le changement de perspective qui s’est opéré, dans notre pays. Après la Seconde Guerre mondiale, les premiers immigrés musulmans étaient pour l’essentiel des hommes qui venaient en célibataires pour des raisons économiques et aspiraient à rentrer dans leurs pays d’origine une fois qu’ils auraient les moyens de faire vivre leurs familles chez eux. Ils n’avaient donc aucune revendication d’ordre religieux ou communautaire. Tout a changé à partir des années 1970 au cours desquelles divers gouvernements ont opté pour le regroupement familial (en France, ce fut en 1974, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing), puis pour des assouplissements en matière de nationalité (droit du sol plutôt que droit du sang) et, enfin, la possibilité accordée aux étrangers de fonder des associations de la loi 1901. Des évolutions de cette nature se sont produites dans la plupart des pays d’Europe, certains optant même officiellement pour le multiculturalisme, comme en Grande-Bretagne.
Ainsi, peu à peu, le Vieux Continent a eu affaire à une immigration de peuplement, donc définitive. Les musulmans en Europe veulent vivre selon les principes de leur religion et de leur culture. Il faut savoir que l’islam porte un projet qui est aussi social et politique puisqu’il mêle le spirituel et le temporel. Et cette conception repose sur une volonté attribuée à Dieu, à travers le Coran, et sur l’exemplarité de Mahomet, qualifié de « beau modèle » dans ce même Coran (33, 21).
Or, les fondements de la culture islamique sont étrangers à ceux de la culture européenne, qui repose essentiellement sur le christianisme. Par exemple, l’islam ignore le concept de « personne », qui est d’origine biblique et s’enracine dans la réalité du Dieu trinitaire. La Genèse enseigne en effet que “Dieu créa l’homme à Son image, à l’image de Dieu, Il le créa, Il les créa homme et femme” (Gen 1, 27). Ainsi comprise, la personne humaine est dotée d’une dignité inaliénable et inviolable. Or, le récit coranique de la création occulte cette merveilleuse réalité. Allah reste étranger à l’homme, Il ne partage rien avec lui. Le mot « personne » est d’ailleurs absent du vocabulaire arabe. C’est pourquoi les chrétiens arabisés du Proche-Orient ont conservé l’usage du mot « ouqnoum », qui signifie « personne » en araméen, la langue que parlait le Christ. Dans l’islam, l’individu trouve sa dignité en tant que « soumis » à Dieu et membre de l’Oumma, la communauté des musulmans, éléments qui le privent d’une vraie liberté, notamment dans le domaine de la conscience et de la raison.
Il s’agit là d’une divergence fondamentale entre le christianisme et l’islam concernant la vision de l’homme et de sa vocation.
En s’établissant en Europe, les musulmans auraient pu bénéficier de la conception chrétienne en matière d’anthropologie. Mais l’islam s’installe chez nous alors que nous avons perdu de vue les racines de cette vision sur l’homme et de tout ce qui constitue les fondements de notre civilisation, notamment la liberté, dévoyée en libéralisme absolu, et l’égalité, dévoyée en égalitarisme ; alors aussi que nous sommes pervertis par l’athéisme et le laïcisme. Ayant délaissé notre héritage chrétien, nous sommes incapables de transmettre aux musulmans ce que nous avons de meilleur. En outre, ces derniers rejettent notre culture actuelle, alors qu’il y a encore un siècle elle leur paraissait attrayante et digne d’imitation.
Pour répondre plus précisément à votre question, l’islam en Europe heurte de plein fouet une société décadente qui, non seulement la rend incapable de relever le défi existentiel représenté par cette réalité nouvelle, mais la prépare à se soumettre à un système où Dieu et la loi divine ont la première place. Le problème est donc avant tout spirituel et culturel.
R&N : Quel statut l’islam donne-t-il au texte du Coran ? Comment l’islam accepte-t-il (ou non) la critique littéraire et historique de son texte et de sa formation ?
Annie Laurent : Selon une définition dogmatique fixée au IXe siècle, au temps du califat abbasside régnant à Bagdad, le Coran est un Livre « incréé ». Il a Dieu seul pour auteur. Il fait même partie de l’être divin puisque, dans sa forme matérielle, il est la copie conforme d’un original, la « Mère du Livre », conservé auprès d’Allah de toute éternité (Coran 13, 39), donc préexistant à l’histoire. Contrairement à la Bible, qui se présente comme un recueil d’œuvres écrites par des hommes sous la motion de l’Esprit Saint (doctrine de l’inspiration), la créature humaine n’a joué aucun rôle dans l’élaboration et la rédaction du Coran. Pour accréditer cette thèse, les musulmans ont toujours dit que Mahomet était illettré et ils l’ont présenté comme le transmetteur passif.
A cause de son statut divin, le Coran est intouchable. Il ne peut être soumis à une exégèse faisant appel aux sciences humaines, selon les critères historico-critiques appliqués à la Bible dans l’Église catholique. Il n’est pas interdit de s’interroger sur « les circonstances historiques de la Révélation » ; cette science est reconnue par les écoles qui ne s’en tiennent pas à une lecture littéraliste, mais elle ne peut contredire le caractère éternel du Coran dont le contenu est anhistorique. De même, les savants musulmans admettent le rôle du troisième calife, Othman, dans la composition du Coran tel qu’il existe encore. Mais ils ne s’interrogent pas, par exemple, sur les raisons qui ont motivé l’ordonnancement du texte. Les sourates et les versets ne sont pas classés par ordre chronologique de leur « descente » (mot servant à qualifier la transmission du Coran à Mahomet par l’ange Gabriel) ni par ordre thématique. L’ordre retenu est la longueur décroissante des sourates, la première mise à part, qui est très brève. Si bien que la deuxième est la plus longue tandis que la dernière, la 114è, est la plus courte. S’il en fut ainsi c’est que Dieu l’a voulu. La critique littéraire est également impossible. Le Coran se présente comme ayant été dicté en langue arabe (41, 2-3 et 43, 3). Or, des recherches effectuées par des philologues, malheureusement non musulmans, montrent que ce texte contient des emprunts à d’autres langues sémitiques comme l’araméen et le syriaque.
Il faut espérer que des musulmans oseront un jour se lancer dans des recherches scientifiques sur tous les aspects relatifs aux origines du Coran et de leur religion. On observe cependant de nos jours une prise de conscience chez certains de leurs intellectuels du fait qu’il y a un mal interne à l’islam et que la crise actuelle, d’une gravité sans précédent, ne trouvera pas de solution tant qu’une autorité reconnue n’aura pas le courage de soutenir d’authentiques travaux scientifiques sur le Coran.
R&N : « Ce n’est pas ça l’islam », entendons-nous régulièrement après un attentat islamique. Les mouvements djihadistes se situent-ils en marge de l’islam ?
Annie Laurent : Il est de bon ton d’affirmer que l’islamisme, au sein duquel le djihadisme constitue la forme violente, est étranger à l’islam, qu’il en constitue une perversion ou un accident de l’histoire. Cela est faux. D’ailleurs, jusqu’au XXe siècle, en Occident, la religion des musulmans était appelée « islamisme ». Désormais, on veut distinguer l’islam compris comme religion de l’islamisme compris comme idéologie. Mais les deux dimensions sont étroitement mêlées.
Le Coran comporte des dizaines de versets dans lesquels Allah demande aux musulmans de combattre, de tuer, d’humilier, etc. Je n’en citerai ici que deux : « Combattez : ceux qui ne croient pas en Dieu et au Jour dernier ; ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son Prophète ont déclaré illicite ; ceux qui, parmi les gens du Livre [juifs et chrétiens selon le Coran], ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez-les jusqu’à ce qu’ils paient directement le tribut après s’être humiliés » (9, 29). Et celui-ci : « Que les incrédules n’espèrent pas l’emporter sur vous ! Ils sont incapables de vous affaiblir. Préparez, pour lutter contre eux, tout ce que vous trouverez de forces et de cavalerie, afin d’effrayer l’ennemi de Dieu et le vôtre » (8, 59-60).
Les djihadistes se conforment donc à ce qu’ils croient être des ordres divins. Et ils anathématisent ceux qui, parmi leurs coreligionnaires, refusent de pratiquer la violence. Pour eux, ce sont de mauvais musulmans qui méritent donc également la mort.
On ne doit certes pas enfermer tous les musulmans, pris indistinctement, dans un cadre idéologique légitimant la violence, mais prétendre que les djihadistes trahissent l’islam est une erreur. Le problème est qu’aucune autorité ne peut vraiment les condamner, sauf à considérer le Coran comme condamnable.
R&N : Le concept de taqiya existe-t-il réellement dans l’islam ou est-ce une invention récente ?
Annie Laurent : Précisons d’abord le sens de ce mot arabe : taqiya signifie « dissimulation ». Or, là aussi, contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas d’une perversion de l’islam. Certes, le Coran interdit formellement de renoncer à leur religion, sous peine de châtiments divins et de malédictions éternelles (cf. 2, 217 ; 3, 87 ; 4, 115 et 16, 106). Les musulmans ne peuvent donc en principe dissimuler leur identité et travestir leurs croyances. Cependant, le Coran évoque deux types de situations où il est possible, voire recommandé, de pratiquer la taqiya. D’une part, en cas de contrainte extérieure, le musulman peut renier Dieu extérieurement tout en conservant sa croyance dans le cœur (16, 106). D’autre part, en cas de rapports de forces défavorables, lorsque le fait de s’opposer aux infidèles présente du danger, il est possible de prendre ceux-ci pour alliés (3, 28-29) alors qu’en principe cela n’est pas autorisé (3, 118 ; 5, 51 ; 9, 23 ; 60, 13).
On est loin ici de la doctrine chrétienne, pour laquelle aucun prétexte ne doit servir à dissimuler sa foi en Jésus-Christ ou son identité baptismale, ce qui peut évidemment conduire au martyre.
Cela dit, historiquement, la taqiya a d’abord été pratiquée dans les communautés minoritaires ou dissidentes (chiites, druzes, alaouites, alévis). Mais aujourd’hui, elle est admise chez les sunnites, surtout lorsque ceux-ci sont en situation de minorités comme c’est le cas en Europe.
R&N : Les catholiques sont invités à imiter le Christ et les saints. Quel modèle Mahomet est-il pour le musulman ? L’islam donne-t-il à ses fidèles d’autres exemples à suivre ?
Annie Laurent : Pour les musulmans, Mahomet est le « sceau des prophètes ». « Pas de prophète après moi », aurait-il dit, selon la tradition islamique. Il est donc le plus grand, le préféré d’Allah qui lui a accordé une bénédiction spéciale, et son comportement est édifiant. Toute critique à son égard est dès lors considérée comme blasphématoire. On l’a vu avec les réactions violentes qui ont suivi les caricatures de Mahomet.
Du fait de cette excellence, cela ordonne de lui obéir car cela revient à obéir à Dieu (3, 132 ; 4, 80). Tout ce que Mahomet a dit, a fait ou n’a pas fait, en telle ou telle circonstance est donc normatif, digne d’imitation. Les récits rapportant tous ses actes, ses recommandations et ses ordres ont été recueillis par des témoins, puis rassemblés dans des volumes qui constituent la Sunna, la tradition prophétique. Celle-ci a tellement d’importance qu’elle est la deuxième source du droit musulman. Elle complète ce qui manque au Coran dans l’ordre législatif. En Occident, on a trop tendance à minimiser l’importance de la Sunna. Ce qui me frappe, c’est que les musulmans savent que Mahomet a tué, a menti et a rusé, a pillé des caravanes, a spolié les juifs de Médine de leurs biens, a été polygame, autrement dit n’a pas eu une vie morale exemplaire. Mais ils ne s’interrogent pas sur son comportement et ne se lancent pas dans une comparaison avec celui de Jésus tel qu’il est rapporté dans les Évangile. Au contraire, le fait que Mahomet ait eu une vie comme celle de nombreux hommes sert l’apologétique islamique : elle permet de montrer que les musulmans ne considèrent pas Mahomet comme un dieu, sous-entendu comme le font les chrétiens avec Jésus.
Pour l’islam, Jésus n’est qu’un prophète, chargé d’une double mission : apporter l’Évangile pour rectifier les erreurs que les juifs auraient introduites dans la Torah de Moïse, annoncer la venue de Mahomet comme « sceau des prophètes ». C’est en cela qu’il est digne de respect. Mais il n’est ni le Fils de Dieu, ni Rédempteur. Ignorant la réalité du péché originel, l’islam ne conçoit pas la nécessité d’un salut.
Un personnage occupe une place privilégiée dans le Coran. Il s’agit de Marie, à laquelle la sourate 19, qui porte d’ailleurs son nom, consacre de beaux passages. Certes, son identité est floue car elle est présentée à la fois comme la mère de Jésus et comme la sœur de Moïse et d’Aaron, lesquels avaient bien une sœur portant le nom de Mariam. Mais des générations séparent les deux Marie. Selon le Coran, Marie est honorée pour avoir donné naissance au prophète Jésus, conçu miraculeusement. Sa virginité perpétuelle est également reconnue. Mais, après la naissance de son fils, elle disparaît, on ne parle plus d’elle. Cependant, elle est décrite comme une parfaite musulmane, soumise à Dieu. C’est en cela que les musulmans sont invités à l’admirer et à l’imiter. S’ils ne peuvent en principe pas l’invoquer à la manière des chrétiens, j’observe qu’une authentique dévotion mariale se développe dans une partie du monde de l’islam.
J’en déduis, et c’est ma conviction, que Marie est le « porche de l’espérance ». Je crois que c’est par elle que les musulmans sont appelés à découvrir l’identité véritable de Jésus-Christ. Il n’est d’ailleurs pas rare que des musulmans se convertissent grâce à elle.
Les musulmans honorent par ailleurs Aïcha, l’épouse préférée et influente de Mahomet, très présente dans la Sunna. Elle est considérée comme la « mère des croyants ». On peut aussi mentionner Fatima, la fille d’Ali, cousin et gendre de Mahomet.
L’islam ignore le concept de sainteté au sens chrétien du terme. Seul les musulmans adeptes du soufisme, version mystique de l’islam, au demeurant ultra-marginale, vénèrent des saints qui leur sont propres. Mais aucune autorité spirituelle n’a le pouvoir de canoniser des êtres humains.
R&N : La perception de l’Église catholique en Occident sur l’islam est-elle équilibrée ? Elle semble bien différente de celle des chrétiens d’Orient.
Annie Laurent : En effet ! Le problème vient du fait que les Occidentaux ont oublié leur histoire ; ils ont oublié que la conscience d’une identité européenne s’est largement forgée dans la confrontation avec l’islam, contre lequel il a fallu se défendre pendant des siècles. Il faut ajouter à cela le syndrome qui a suivi la décolonisation et qui a engendré une forme de complexe particulièrement malsain car il conduit à une auto-culpabilisation qui demeure malgré les évidences actuelles. Le pacifisme qui s’est emparé de l’Occident après la Seconde Guerre mondiale est également responsable de cette situation. Dans certains milieux chrétiens, on rejette l’idée que l’on puisse avoir des ennemis, oubliant ainsi que le Christ Lui-même en a eus. C’est, hélas, une réalité héritée du péché originel et qui, comme telle, demeurera tant que durera l’histoire humaine. Nier la réalité des ennemis désarme l’Occident et le rend incapable de porter un regard lucide sur l’islam. Ce qui compte pour les chrétiens, ce n’est pas de s’enfermer dans le déni mais de chercher dans l’Évangile les moyens de répondre au défi de l’islam.
Pour leur part, les chrétiens d’Orient n’ayant jamais cessé d’être confrontés à l’islam, n’ont pas cédé aux dérives que je viens de décrire. Ils nous parlent à partir d’une expérience souvent douloureuse qui n’a jamais été vraiment interrompue. Leur parole doit donc être prise très au sérieux.
R&N : Vous avez par ailleurs créé l’association CLARIFIER. Quel en est le but ?
Annie Laurent : C’est essentiellement pour remédier à l’ignorance et à l’oubli dont je viens de parler qu’avec quelques amis nous avons créé cette association qui existe depuis 2009. Étant de formation juridique, je suis attachée à la précision, à la concision et à la rigueur des mots. Or, trop de confusions entourent la présentation de l’islam dans ses divers aspects. Il faut y apporter de la clarté. Notre action se distingue donc par un souci pédagogique. Par ailleurs, tout en portant un regard lucide sur l’islam, nous tenons à marquer de la bienveillance et du respect envers les personnes qui professent cette religion. C’est pourquoi nous avons choisi comme devise la phrase de saint Paul pour qui « la charité met sa joie dans la vérité » (I Co 13, 6).
Concrètement, nous diffusons périodiquement des Petites Feuilles vertes, qui traitent de tel ou tel sujet. Celles-ci sont envoyées par courrier électronique. Il suffit pour les recevoir de s’inscrire en allant sur le site de l’association : www.associationclarifier.fr
Nous proposons aussi des conférences et des sessions de formation à l’islam destinées à toutes sortes de publics : élus locaux, entreprises, établissements d’enseignement, ecclésiastiques.
Pour tout contact, on peut écrire à l’une des deux adresses suivantes.
Adresse postale : Association Clarifier – Galaxy 103 – 6 bis rue de la Paroisse – 78000 Versailles.

https://www.lerougeetlenoir.org/opinions/les-inquisitoriales/annie-laurent-la-conscience-d-une-identite-europeenne-s-est-largement-forgee-dans-la-confrontation-avec-l-islam

La violence tribale dans le Coran et les razzias de Muhammad


http://islamisation.fr/2017/10/10/la-violence-tribale-dans-le-coran-et-les-razzias-de-muhammad/

La source du terrorisme est dans l'enseignement islamique officiel" alerte un général égyptien



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"La source du terrorisme est dans l'enseignement islamique officiel" 

alerte d'un général égyptien

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إطلاق أول مشروع لكشف العلاقة بين الدین والعنف السياسي

Thursday, October 12, 2017

إطلاق أول مشروع لكشف العلاقة بين الدین والعنف السياسي

"غدي نيوز"

       طلق مركز "تريندز" للبحوث والاستشارات، من داخل مجلس اللوردات البريطاني، مشروعا هو الأول من نوعه في أوروبا لبحث القضايا المتعلقة بالعلاقة بين الدين والعنف السياسي.
       ووفقا لموقع "سكاي نيوز" أعلن مؤسس ورئيس مركز "تريندز"، أحمد الهاملي، إطلاق "المشروع الذي سوف ينفذ بالاشتراك مع المركز الدولي لدراسة التطرف والعنف السياسي في جامعة كينغزكوليدج في العاصمة البريطانية.
       وحضر إطلاق المشروع ممثلين عن الحكومة البريطانية والمنظمات الأهلية المحلية ووسائل الإعلام والباحثين والمحللين لمناقشة أهمية "بحث قضية استغلال الدين في الترويج للعنف السياسي وتبريره".
استغلال الدين

       والهدف الأساسي للمشروع هو "بحث كيفية استغلال الدين كأداة ومحفز رئيسي للعنف السياسي"، وفق تريندز الذي أكد أن "العلاقة بين تسيس الدين والعنف السياسي قضية أمنية عاجلة في العالم اليوم لأن تأثيرها يمتد إلى أرجاء العالم".
       ولفت الهاملي إلى "أننا نشهد في عالم اليوم استغلالا مكثفا للأيدولوجية الدينية بالتزامن أيضا، مع رفض قوي واسع النطاق لاعتبار الدين عاملا رئيسيا في استخدام العنف السياسي".
       وشدد على الحاجة الملحة "لمواجهة الفكر المتطرف غير العنيف باعتباره الأساس الذي تبرر به هذه الجماعات الثورة ضد المجتمعات المستقرة". وضرب مثالا بجماعة الإخوان والمنظمات المرتبطة بها سواء في أنحاء العالم.
       ووصف الهاملي العلاقة بين الدين والعنف السياسي بأنها "إحدى القضايا الأمنية الملحة والخطيرة في الوقت الراهن"، منبها إلى أنه "لا يجب التهاون في مواجهة التيارات الثورية التي تختفي تحت عباءة الدين لأنها تقوض الأمن وتنشر الفوضى في العالم بأسره".
       وقال "من المهم للغاية إجراء بحوث علمية عميقة تكشف جذور العلاقة بين الأفكار الدينية والعنف المدفوع بأغراض سياسية".

مناخ علمي

       وأضاف في لقاء عقد برعاية اللورد ألدردايس، أن مركز "تريندز" يأمل تشكيل "شبكة من الخبراء والجهات المعنية من شأنها توفير مناخ علمي يمكن هؤلاء من التفاعل والوصول إلى فهم دفيق للقضايا والمشاغل المتصلة بالعلاقة بين الدين والعنف السياسي".
       وأعرب الهاملي، وهو أيضا خبير في قضايا مكافحة الإرهاب والأمن الدولي، عن أمله في أن "يسهم المشروع البحثي الجديد في فهم العلاقة الملتبسة بين الدين الذي يساء فهم وتفسير نصوصه من جانب الجماعات والمنظمات الدينية وبين العنف السياسي خصوصا في الشرق الأوسط".
       ومن المتوقع أن يصدر، في إطار المشروع، سلسلة من التقارير الشهرية التي تعالج المواضيع الهامة المتصلة باستخدام الدين والنصوص الدينية التي تستغل كأساس لتبرير ممارسة أعمال العنف ذات الدوافع السياسية.
       ووصف شیراز ماهر، نائب مدير المركز الدولي لدراسة التطرف والعنف السياسي في جامعة كینغزكولیدج، المشروع الجديد بأنه "بالغ الأهمية ويعالج قضية ملحة في الوقت الحالي".
       وأكد المشاركون في اللقاء أن المشروع جاء في الوقت المناسب لمواجهة منظمات وجمعيات تتبني تفسيرات متطرفة للدين.
       ويرى مركز "تریندز" أن أوروبا، مثل الشرق الأوسط، في حاجة ماسة لفهم العلاقة بين استغلال الدين لتبرير العنف السياسي، وهو الأمر الذي يعتقد الهاملي أنه "سوف يسهم في مساعدة الدول الأوروبية على إدراك خطورة المنظمات الدينية النشطة فيها".