Menacés de mort par l'Etat islamique, les chrétiens d'Irak fuient au Kurdistan
Les hommes d'Abou Bakr Al-Baghdadi, le chef djihadiste qui se présente comme le « calife Ibrahim », n'ont guère laissé le choix aux chrétiens d'Irak qui avaient, en onze ans de chaos et de montée de l'islamisme radical, résisté au départ en exil. Ils leur ont donné une journée, de vendredi 18 à samedi 19 juillet à midi, pour quitter le territoire du califat, les autres options étant de se convertir à l'islam, de payer un impôt spécial pour les non-musulmans, ou de périr « par le glaive ».
L'annonce concernait principalement les chrétiens de Mossoul, devenu le quartier général du califat qui s'étend désormais des faubourgs d'Alep, en Syrie, à ceux de Bagdad. La seconde ville d'Irak, où l'Etat islamique a installé son quartier général, et certains villages environnants abritaient encore une communauté de plusieurs milliers de chrétiens (de 5 000 selon diverses sources irakiennes à 25 000 selon Louis Sako, le patriarche de l'Eglise catholique chaldéenne).
Depuis la proclamation du califat par l'Etat islamique, le 29 juin, au premier jour du ramadan, des milliers d'Irakiens sont morts, exécutés par les djihadistes ou tués au combat, et environ 600 000 personnes auraient quitté leur foyer. La première destination des réfugiés, et ces derniers jours des chrétiens de Mossoul, est le Kurdistan irakien, région voisine des territoires conquis par l'Etat islamique mais qui reste la plus stable et la plus prospère du pays.
CROIX DES ÉGLISES DÉTRUITES
Avant l'expiration de l'ultimatum, selon des témoignages recueillis par téléphone par les agences de presse internationales et des médias irakiens, les maisons des chrétiens de Mossoul ont été marquées de la lettre N, pour « nassarah », nom utilisé pour désigner des chrétiens dans le Coran, et les croix des églises ont été détruites et remplacées par le drapeau de l'Etat islamique. Sur la route, aux points de contrôle à la sortie de Mossoul, les djihadistes ont volé l'argent et les bijoux des réfugiés, ainsi que certaines voitures.
A Bagdad, le premier ministre, Nouri Al-Maliki, a condamné l'expulsion des chrétiens de Mossoul et en a profité pour réclamer une aide internationale contre l'Etat islamique, « groupe criminel et terroriste ». Du Vatican aux Etats-Unis, les condamnations sont unanimes. La question qui se pose pour la communauté internationale est l'éventuel accueil des 400 000 derniers chrétiens d'Irak, dont la vaste majorité, de l'aveu même du clergé local, est candidate au départ.
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La présence de chrétiens est avérée dans la région depuis le Ier siècle. Ils étaient encore un million au moment de la première guerre du Golfe en 1991, et 800 000 lors de l'invasion américaine de 2003 (dont 100 000 dans la région de Mossoul). Depuis onze ans, un millier de chrétiens ont été tués, environ 400 000 ont quitté le pays, et une soixante d'églises ont été détruites par les islamistes.
L'Etat islamique, parallèlement à des avancées qu'aucune contre-offensive de l'armée irakienne ne parvient à stopper, consolide son pouvoir sur les territoires conquis depuis la prise de Mossoul, le 10 juin. Après avoir assassiné soldats et policiers chiites irakiens, ses miliciens ont également tué des religieux sunnites, pourtant proches de l'insurrection antigouvernementale, notamment dans la province occidentale d'Al-Anbar, pour avoir refusé de prêter allégeance au califat.
ATTENTATS COORDONNÉS
A Mossoul, l'état-major du « calife Ibrahim » a installé ses bureaux au consulat de Turquie, qu'il a réquisitionné dès son entrée dans la ville, prenant en otages 49 Turcs, dont le consul général, toujours prisonniers à ce jour. Les combattants de l'Etat islamique, après avoir dans un premier temps mis l'accent sur des programmes humanitaires, instaurent un régime de terreur, dictant leur loi non seulement aux minorités mais aussi à la communauté sunnite, comme ils l'ont fait précédemment à Rakka et dans les territoires conquis en Syrie.
L'offensive djihadiste se poursuit actuellement sur au moins six fronts, à la fois en direction de Bagdad et du Kurdistan. Six attentats coordonnés à la voiture piégée ont secoué les quartiers chiites de la capitale irakienne, le même jour que celui du départ des chrétiens de Mossoul, faisant 24 morts.
Envoyé de mon Ipad
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