Vienne: des
leaders religieux s'unissent "contre la violence au nom de la
religion"
02.03.2018 par
Jacques Berset, cath.ch
Une
bonne vingtaine de représentants religieux chrétiens et musulmans de haut rang ont lancé une
plate-forme de dialogue pour la région du Moyen-Orient à l’occasion d’un
congrès, les 26 et 27 février 2018 à Vienne. Le but de
cette première historique est de s’unir “contre la violence au nom de la
religion”.
Les chefs
religieux se sont engagés à promouvoir, dans les régions arabes, la diversité et la citoyenneté par le dialogue et le
travail en commun afin de reconstruire et de protéger leurs communautés des
effets de la rhétorique et des actions extrémistes et violentes.
Organisée par le Centre international du Roi Abdallah ben Abdelaziz
pour le dialogue interreligieux et interculturel (KAICIID), basé à Vienne, des
importants responsables musulmans, chrétiens et juifs ainsi que des représentants
d’autres communautés religieuses se sont exprimés d’une seule voix en faveur de la cohésion sociale, de la coexistence pacifique
et du respect de la diversité religieuse.
Congrès du Centre
international du Roi Abdallah ben Abdelaziz pour le dialogue interreligieux et
interculturel, les 26 et 27 février 2018 à Vienne (KAICIID)
Faire
de l’islam une partie de la solution
A Vienne,
l’Arabie saoudite a confirmé sa volonté “de faire de l’islam une partie de la
solution et non plus du problème”, a confié au quotidien francophone libanais
L’Orient-Le Jour le patriarche maronite, le cardinal Béchara
Raï. “Je pense que le royaume est sincère dans sa volonté d’ouverture, mais je
regrette l’insuffisance de la représentation chiite”, a-t-il déclaré.
Le patriarche
libanais considère comme “très positifs” les efforts déployés par le centre
KAICIID. Il a déclaré participer à la conférence de Vienne “dans l’esprit qui a présidé à ma visite en Arabie saoudite,
en décembre 2017, et en signe de gratitude pour l’accueil fastueux, qui, pour
la première fois, m’a été manifesté en ma qualité de patriarche maronite, au
palais des hôtes”.
Les chiites
quasiment absents
Fort de
l’ouverture des chrétiens à toutes les communautés, le patriarche Raï déplore l’absence à Vienne d’une représentation chiite
digne de ce nom et affirme que les organisateurs auraient dû s’y
efforcer “à tout prix”, relève le journaliste Fady Noun, responsable de la
rubrique religieuse à L’Orient-Le Jour.
“Dans l’état
actuel des rapports entre l’Iran et l’Arabie saoudite, l’effort, de toute
évidence, n’a pas été fait”. En effet, il y avait à Vienne, venu du Liban, le
cheikh Sayyed Ali el-Amine, ancien mufti de Tyr, ainsi qu’un confrère venu
d’Irak, “une représentation insuffisante au regard des ambitions déclarées”.
L’expertise
libanaise dans le vivre-ensemble
L’expertise
libanaise dans le vivre-ensemble s’est signalée par la présence sur place du
mufti de la République, Abdellatif Deriane, du métropolite de Beyrouth Elias
Audi, d’un représentant du cheikh Akl, le cheikh Gandhi Makarem, du catholicos
arménien Aram Ier, de l’archevêque de Beyrouth, Boulos Matar, de la secrétaire
générale du Conseil des églises du Moyen-Orient (MECC), Souraya Bechaalani,
première femme à occuper ce poste, et du Père Fadi Daou, d’Adyan, une fondation
libanaise pour les études interreligieuses et la solidarité spirituelle. Elle a
été fondée le 6 août 2006 par des membres de confessions chrétiennes et musulmanes.
“Jésus a détruit
la violence dans son corps même”
“Jésus
a détruit la violence dans son corps même”, a résumé pour son auditoire, à l’hôtel Hilton, le patriarche Raï,
soucieux de faire passer la pensée des présents, comme l’avait éloquemment affirmé
un peu auparavant le patriarche de Constantinople, Bartholomée, “de la
tolérance à l’amour”. Le patriarche devait également affirmer avec vigueur que
“le moment” – le “kairos” – est là, et qu’il faut le saisir. “L’Eglise a tourné un jour la page de la violence exercée au
nom de Dieu”. Le moment est donc venu pour que l’islam “saisisse
l’occasion que l’Esprit Saint lui offre et le fasse à son tour”. Les crimes commis au nom de la religion sont désormais “une
offense pour plus d’un milliard de croyants”.
“Convertir le
monde au dialogue”
Fayçal
ben Muammar, secrétaire général du Centre international du Roi Abdallah ben Abdelaziz pour le dialogue interreligieux
et interculturel (KAICIID), a déclaré en
ouverture qu’il fallait “convertir le monde au dialogue”.
L’Arabie saoudite, qui traîne une réputation sulfureuse de promotion du
salafisme, se veut désormais “l’un des moteurs d’une révolution culturelle et
religieuse qui conduirait l’islam à être une partie de la solution, et non plus
du problème”.
La monarchie wahhabite viendrait ainsi au secours de “la
majorité modérée” qui souffre en silence des ravages de l’extrémisme, tel qu’il
a, entre autres, assombri la plaine de Ninive, en Irak, ensanglanté les plages
de Libye, ravi à leurs parents de jeunes pensionnaires au Nigeria, heurté et
écrasé à mort des promeneurs à Nice, mitraillé des spectateurs au Bataclan à
Paris et décapité la rédaction de la revue Charlie Hebdo.
Mohammad ben
Salmane face au wahhabisme
La présence à
l’inauguration des travaux du congrès de personnalités saoudiennes de premier
plan, comme le ministre d’Etat aux Affaires étrangères Nizar Madani, et
Mohammad ben Abdul Karim el-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique
mondiale, reflèterait l’aspiration
du prince héritier Mohammad ben Salmane (MBS) de faire de son royaume le centre
d’un “islam du juste milieu et de la modération”.
Il a en tout cas
affirmé que “l’usage de la
religion à des fins de violence est une faute grave”, relevant que les Saoudiens se
faisaient “les avocats de la diversité, de la citoyenneté et de la
participation”. Rappelons que la Ligue islamique mondiale est
l’institution qui finance les mosquées et dissémine la doctrine rigoriste
wahhabite dans le monde. En tout cas jusqu’à récemment, car ce financement
aurait désormais cessé.
Guerre déclarée à
l’extrémisme ?
“C’est, sans
aucun doute, la guerre
déclarée à l’extrémisme, le divorce total avec la doctrine wahhabite qui a
régné en Arabie saoudite, depuis Ibn Saoud”, souligne le journaliste Fady Noun.
Les chefs religieux
présents au congrès étaient notamment
le patriarche
œcuménique Bartholomée de Constantinople,
Mohammad ben
Abdul Karim el-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale (LIM),
Abbas Shuman,
adjoint du grand Imam d’Al Azhar,
le patriarche
copte orthodoxe Théodore II (Tawadros II) pape d’Alexandrie et de toute
l’Afrique, Pinchas Goldschmidt, grand rabbin de Moscou et président de la
Conférence des rabbins européens (CER),
Adama Dieng,
conseiller spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la prévention du
génocide, et Ahmad Alhendawi, Secrétaire général de la Fondation du Scoutisme
Mondial.
(cath.ch/orj/kaiciid/be)
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