EGYPTE - Proposition de nouvelle norme de la part de l’Université d’al-Azhar à la Présidence de la République contre la justification de la violence pour motifs religieux |
Le Caire (Agence Fides) – Les chercheurs de l’Université d’al-Azhar, principal centre académique de l’islam sunnite, ont soumis aux bureaux de la Présidence de la République égyptienne le texte d’une proposition de loi visant à lutter contre les violences et la propagande incitant à la haine sectaire justifiées par des motifs religieux. C’est ce qu’a indiqué le grand imam d’al-Azhar, le cheick Ahmed al Tayyib, en précisant que le projet vise à réaffirmer la totale incompatibilité entre la violence justifiée à l’aide d’arguments religieux et la loi islamique. Le texte approuvé par des chercheurs d’al-Azhar puis présenté en fin de semaine dernière aux collaborateurs du Président Abdel Fattah al Sisi, vise à réduire les manifestations de haine et d’intolérance promues par des groupes extrémistes et à mettre à nouveau le principe de citoyenneté à la base d’une coexistence pacifique et féconde entre compatriotes appartenant à différentes composantes religieuses.
Le Comité qui a travaillé au projet de texte, présidé par Mohamed Abdel Salam, conseiller juridique du grand imam d’al-Azhar, a été constitué le 13 mai dernier et était composé de cinq spécialistes de différents secteurs du droit. Dans le projet, les membres du Comité ont tenu compte de textes de référence universels tels que la Déclaration universelle des Droits de l’homme, ainsi que de la Constitution égyptienne et des dispositions de droit pénal en vigueur en Egypte. Le texte évite d’entrer dans le détail des différentes peines à infliger à ceux qui se rendraient responsables d’instigation à la haine religieuse ou de crimes liés à celle-ci, lesquelles devraient être spécifiées par l’autorité judiciaire. L’initiative a comme objectif évident d’exprimer une nette prise de distance d’al-Azhar vis-à-vis des théories et de la propagande présentes au sein de la communauté islamique qui justifient la haine et la violence en citant le coran et en faisant usage d’argumentations religieuses. (GV) (Agence Fides 26/06/2017)
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L'auteur britannique de Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits, commente dans un entretien accordé à L'Obs la crise politique et religieuse qui se profile dans les pays européens où «l'islam s'est radicalisé».
«Il faut arrêter l'aveuglement stupide face au djihadisme qui consiste à dire que cela n'a rien à voir avec l'islam», affirme avec conviction l'écrivain britannique Salman Rushdie lors d'un entretien accordé à L'Obs. «Je suis en désaccord total avec ces gens de gauche qui font tout pour dissocier le fondamentalisme de l'islam», ajoute l'auteur de Deux ans, huit mois et vingt-huit nuits.
En septembre 1988, Salman Rushdie publie en Angleterre son quatrième ouvrage: Les Versets sataniques. L'auteur dresse, parmi d'autres faits inspirés des réalités historiques, un portrait de Mahomet, le prophète fondateur de l'islam. Jugé blasphématoire, il déclenche l'ire des populations musulmanes car il constituerait une offense à l'islam, au prophète et au Coran.
Premier pays à réagir, l'Inde dénonce le caractère injurieux de l'ouvrage et le fait interdire, suivi au mois d'octobre par le Pakistan, l'Arabie saoudite, l'Égypte, la Somalie et de nombreux autres pays. Installé à New York depuis dix-sept ans, la casquette bien vissée sur la tête, l'humeur légère et joyeuse, l'homme de lettres continue d'ausculter le monde.
«Depuis 50 ans, l'islam s'est radicalisé», soutient Salman Rushdie. Selon lui, «il y a bien sûr une tradition d'un islam éclairé. Mais il n'est pas au pouvoir aujourd'hui». «Côté chiite, il y a eu l'imam Khomeini et sa révolution islamique. Dans le monde sunnite, il y a eu l'Arabie saoudite, qui a utilisé ses immenses ressources pour financer la diffusion de ce fanatisme qu'est le wahhabisme. Mais cette évolution historique a eu lieu au sein de l'islam et non à l'extérieur», insiste l'écrivain.
«Quand les gens de Daech se font sauter, ils le font en disant ‘Allahou Akbar', alors comment peut-on dès lors dire que cela n'a rien à voir avec l'islam?», interroge-t-il. Rushdie explique qu'il dit «comprendre» la crainte de «stigmatisation de l'islam» mais il explique aussitôt que «pour éviter cette stigmatisation, il est bien plus efficace de reconnaître la nature du problème et de le traiter».
Un peu partout dans le monde, la religion s'infiltre dans la politique. Pour l'écrivain, les choses sont évidentes. Les islamistes veulent le pouvoir politique. Ils pensent que la société parfaite a existé au VIIe siècle, et la révolution khomeyniste, comme la communiste, se présente comme une révolution contre l'Histoire. «Aujourd'hui, on m'accuserait d'islamophobie et de racisme. On m'imputerait des attaques contre une minorité culturelle», avait déjà affirmé l'écrivain, lors de la sortie de son dernier roman. Il défend la liberté de penser et affirme avoir le droit de dire que la religion est une stupidité.
Salman Rushdie trouve ainsi «consternant» d'entendre «Marine Le Pen analyser l'islamisme avec plus de justesse que la gauche». «C'est très inquiétant de voir que l'extrême droite est capable de prendre la mesure de la menace plus clairement que la gauche». «Le présupposé constant de la gauche, c'est que le monde occidental est mauvais. Et donc tout est passé au crible de cette analyse», déplore-t-il en terminant cet entretien.